Puisque les machines font tout le boulot / Zanzimooc #2

Le Zanzimooc est un atelier en ligne au titre qui frime animé par Zanzibar. La session 2020 a eu lieu entre janvier et juin et permis à une dizaine de bosseuses et de bosseurs de produire un texte de SF sur le thème Puisque les machines font tout le boulot, qui a aussi donné son titre au livre final.

On y trouve onze histoires.

L’appât aux innocents montre des ETs touchants et une chasseuse de mystifications.

Akènes nous raconte un fonctionnaire dont la révolte naît du goût des fraises.

Dans la balade de Nur, une androïde dévouée cesse de trouver un sens à sa vie.

Dans VHYS12-5 on fabrique du pain, on court à pied et les robots plantent des graines compliquées.

Céleste, laserhunteuse d’élite, visite une planète oubliée où grondent les bêtes sauvages dans Lizerion.

Zarg est un noïde nuisible qui vit avec Hélène dans le massif central.

Les OiesZifs sont peut-être des libérateurs, peut-être des bandits, qui luttent contre les machines.

Le Projet Neurone est la retranscription en quasi-direct et narrateur-dynamique de la naissance d’une IA émotive.

Dans Mangue on perd un enfant, on en désire un et on mène des luttes sociales.

Thelma nous emmène hors de la ville idéale de Sisao.

Et Uncivilized nous raconte comment des insectes invasifs mènent à redécouvrir la civilisation.

Le PDF du livre peut être téléchargé gratuitement ici.

L’e-book et le vrai-livre peuvent être achetés ci-dessous. Le montant du livre va à la société Bod, qui le fabrique, ni la CIA ni l’Etat policier ne touchent le moindre sou direct de tout ça. Allez, go, téléchargez ! Achetez !

Il n’y aura pas de science-fiction sans magie

Texte publié initialement ici par Sabrina Calvo.
Recopié ici avec l’autorisation de son autrice.

A la Volte, on m’a demandé d’écrire ce texte l’année dernière, pour les 15 ans de la maison. Oui je slacke mais techniquement la volte a encore 15 ans et pis je connais un môme génial qui vient d’avoir 10 ans et il fallait qu’on fasse des crêpes alors hein, priorités.

J’ai finalement rêvé ce truc cette nuit, en regardant deux colibris baiser sur mon pouce. J’écris ces lignes au saut du lit parce que quelqu’un dans une cantine de quartier à plat unique – je crois que c’était Leos Carax – m’a demandé de le faire, et de le faire de tout mon cœur – il s’est vexé parce que de lui, j’ai pas vraiment vu grand-chose mais j’aime bien sa coupe de cheveux. Il lui paraissait vital de dire que la magie existe, qu’elle est tout autour de nous, qu’on peut lui donner forme et qu’il ne saurait y avoir de toaster sans Chi. Du pain industriel brûlé, un présent à notre portée.

J’en ai ma claque d’avoir toujours à défendre la, hum, poésie de ma science-fiction. En règle générale, dans ces moments là, je grommelle et je dis que je sais pas “vraiment” écrire de la SF. J’écris une impression de SF. L’effet du merveilleux total, sur moi et mes personnages. Une empreinte en creux. un fossile de ce que ça voudrait dire, de se retrouver face à un monde qu’on dit impossible à inventer. La litanie du “tout a déjà été dit, écrit, imaginé”. Comme si désormais, tout devait être du near-future – tout le monde prophète-catastrophiste – le fond de commerce d’un imaginaire en banqueroute – et nous on erre dans les ruines radioactives de nos contraintes et de nos pathétiques séries streamées, sans chien. Le post-post cyberpunk a mourru mais moi j’y crois toujours.

Soyons invraisemblables. Essayer avec toute notre force dérivative de créer des échos, des réverbérations, des larsens partout. Tout ouvrir, les failles, les plaies, les chas d’aiguille et les chats qui font leur toilette. Il y a du moisi à faire germer et personne ne s’y intéresse vraiment alors que c’est dans le compost de nos vies, de nos mythes, de nos espoirs, de nos mauvaises blagues, de nos sexualités joyeuses que se trouve peut-être l’écrin de cette trace. Nos mots en clairvoyance d’astres nouveaux, nos souffles mal fichus en courants sacrés irrigués depuis le cœur sanglant d’une galaxie. La procrastination rend possible l’invisible, par les raccourcis stylistiques et les bâillements ivres de particules fines, les arabesques absurdes qui font du bien, un jeu avec le je-ne-sais-quoi qui contemple un soupir. Ah, Mystère de la présence, de l’intuition, de l’attention sans jugement.

Il y a de la forêt et les étoiles savent pleurer. Faut leur coudre des mouchoirs.

Alors voilà l’antifeste des grosses branleuses.

On y est.

Un dernier truc, quand même. Je me suis souvent demandée pourquoi en “imaginaire” (cette joke), on cherchait à tout prix à séparer le visible de l’invisible en deux jolies poupées qui font oui oui. C’est sérieux de choisir son camps, de dire qu’on est ce qu’on fait et qu’on fait ce que, heu, on est ? Moi je suis pas sérieuse, tous mes profs de fac me l’ont dit, mon banquier aussi, une fois. Vous savez quoi ? On a le droit de pas avoir d’avis, de préférer ne pas. D’être à côté de la plaque totale. De chercher une Fantastique, une science de l’illogique. De faire marcher des réacteurs d’anti-matière avec des croquettes pour chat. Ça marche. C’est OK. Alors on va me dire : trop facile. BEN OUAIS. Et on vous emmerde, nous les approximatives, les putes du virtuel, les baigneuses en bonnet breton et les amoureuses des totems inversés dans la nuit perpétuelle. On a soupé du discours et des démonstrations bien faites, élégantes et bien rangées, mais aussi on aime quand c’est bien rangé, comme à 2048.

Tout dans nos gestes dit la tristesse de devoir séparer le réel, comme si, d’instinct, nous savions notre appartenance à un ensemble dont systématiquement nous dénonçons l’injustice en réclamant notre droit à décapiter Méduse. Fromage OU dessert, hein. Tout a toujours une raison, une cause, un principe. Osons la tension du point aveugle entre deux mouvements contraires du Chariot, pour tout faire dérailler, sans faiblir. L’art du chasse-neige miroir, premier flocon. La tolérance du paradoxe, son traitement pornographique, radiographique, synthétique d’un murmure où l’on croit deviner, peut-être, l’hymne d’une révolution des chaussettes. Tenir la main aux foudres du temps qui passe, aux sourires sans lune, aux robots de pain d’épice ; se faire violence d’aimer inconditionnellement pour accepter tout ce qui échappe à la rigueur d’une mise en mesure. Du cartésianisme, tissons du PQ, pour torcher, soigner, réparer. Noyons leur cirque de merde.

Je n’ai pas honte de m’avouer vaincue.

Une aurore boréale connait son heure.

De la rosée, partout.

Cahiers du CSF #1

Au printemps 2018, Zanzibar a accompagné une poignée d’étudiants du CSF. On a animé des ateliers, parlé science-fiction, invention du futur…

Et ça a donné un petit livre, que vous pouvez retrouver ici, en PDF et qui existera bientôt sous forme papier (quand ? Allez voir le site ci-dessus).

Ca s’appelle Arborescences futures !

Arborescences futures

Ci-dessous, le petit Zanziblabla qu’on trouve vers le début du livre et qui décrit un peu le processus.

Le recueil d’histoires que vous venez d’ouvrir contient dix nouvelles de science-fiction, dix récits situés dans des futurs possibles, désirés ou détestés, qui parlent de nous, les humains, des transformations du monde, des corps, des êtres, de nos relations avec d’autres êtres vivants. On y trouvera des rêveries écologiques ou poétiques, de l’action, du suspense, des sociétés étouffantes ou bien libératrices. Des peurs et des espoirs.

Elles sont nées d’un atelier d’écriture organisé par le Comité Science-Fiction de l’Institut de la Transition Environnementale Sorbonne Universités et animé par nous, Zanzibar.

Zanzibar au fait… Qu’est-ce que c’est ?

Nous sommes un groupe d’autrices et auteurs de science-fiction qui pensons qu’inventer des avenirs possibles et impossibles n’est réservé ni aux rêveurs professionnels (comme nous, et encore), ni aux grosses structures gouvernementales ou entrepreneuriales. Nous voulons ouvrir le plus largement possible l’imaginaire du futur.

Ont participé à cet atelier une douzaine d’étudiantes et étudiants volontaires venus de filières variées : écologie, mathématiques, littérature anglaise… A notre grande surprise, la plupart découvraient et l’écriture, et la science-fiction.

Le groupe a assisté à des conférences organisées par le Comité, présentant les travaux d’une demi-douzaine de chercheurs gravitant autour des questions de transition écologiques et de la biodiversité. Espaces aquatiques dans les grandes cités, trames vertes et trames brunes, notions d’espèces envahissantes, relation entre connaissances écologiques et réalisations politiques, observation de la biodiversité urbaine, cycles de l’eau, de l’azote, du carbone, influence des espèces vivantes sur la régulation de la température, rêveries de science-fiction dans le cadre d’aménagements urbains…

Puis nous avons animé plusieurs jours d’atelier, des moments intenses et amusants, pendant lesquels nous avons tenté de transmettre quelques idées sur l’écriture de science-fiction ainsi que sur les techniques du récit, du dialogue, de la description, etc.

Courant juin, la tâche est devenue plus compliquée : il a fallu écrire. Partir des bribes d’idées rassemblées en atelier, écrire une page, puis une autre, revenir sur ce qui avait déjà été fait, échanger, corriger, reprendre, reprendre encore… Même si toutes les nouvelles n’ont pu être achevées, toutes et tous ont participé avec énergie à ce projet.

Nos étudiantes et étudiants ont appris, et nous avons appris également : il est stimulant d’essayer de transmettre quelque chose de notre savoir-faire, de confronter nos croyances et ce que nous pensions savoir au fond de nous aux esprits affutés du groupe.

Personne n’enseigne comment imaginer le futur ni comment le raconter, comment jouer ce jeu de d’extrapolations et de rêves. Ces séances de travail, de lectures, de relectures, ont été pour nous, Zanzibar, une belle occasion d’apprendre sur notre propre travail.

Protokools confinés – 2

RITUELS CONFINES

– inventer le nom d’un rituel domestique, passer à sa voisine

– décrire le matériel, le lieu, les conditions de réalisation du rituel, passer à sa voisine

– décrire le rituel

La grille

Pour réaliser le rituel de la grille, il faut du papier kraft, du scotch transparent, de la feutrine, de la graisse animale, des marqueurs à eau (noir ou bleu), une robe monochrome qui couvre les bras jusqu’aux poignets, les jambes jusqu’aux genous. Il faut attendre le soir et sortir discrètement de la pièce dans laquelle on se trouve. S’il n’y a qu’une seule pièce, au aura soin d’évider un poulet, un pigeon, ou tout petit animal se trouvant à portée. Qu’il y ait ou non une seconde pièce, on prendra soin de nettoyer le sol de l’endroit où l’on se trouve au commencement de ce rituel. Faute de quoi, les conséquences ! On prendra tout d’abord la robe, qu’on jaugera d’une regard comme s’il s’agissait d’une bête de foire, oui, une épaisse bête de foire à fourrure. On imaginera cette bête de foire à fourrure plus grande que la robe car il faut toujours qu’il y ait du mou, du jeu. On prendra soin d’être dans le jeu, le mou. On commencera par graisser l’intérieur de la robe. Si l’on a sacrifié un petit animal pour se donner une seconde pièce, on attachera la tête décharnée du petit animal au col de la robe, au moyen d’un instrument tranchant ou de sa simple volonté. Oui, parfois, la volonté seule suffit à attacher des crânes à des cols. On franchira à trois reprise ce col. Adret, ubac, adret. On prendra soin de ne jamais le franchir une quatrième fois. Ensuite, par le plus grand des hasards, on choisira un nom pour cette robe graissée. Ce nom pourra être Triplette ou Sentiment vaseux de la lune après emploi, ou Bisou. On choisira ce nom par le plus pur des hasards. Une fois réunies la graisse, le hasard et la robe (avec ou sans tête, une robe sans tête fait aussi bien l’affaire lorsqu’on a plus d’une pièce à disposition) on passera trois fois la robe chargée de graisse et de nom. Une fois ôtée la troisième fois, on remplira la robe de feutrine jusqu’à ce qu’elle atteigne l’envergure satisfaisante d’une bête de foire à fourrure. Une fois remplie, on l’installera au sol, couchée

 sur le flanc car cette position s’appelle POSITION DE SECURITE et on lui dessinera un visage sans yeux. Si la robe est dotée d’une tête à l’encolure, on peut se passer de cette étape. Une fois la robe en position de sécurité, on se skotchera les paupières. On prendra soin de ne plus rien voir.

C’est ainsi qu’on franchit la grille.

La tenture triste

La tenture triste est un rituel populeux, bruyant et parfois surpeuplé : c’est un rituel qui appelle. Il est dangereux de se lancer dans cette tenture quand on est soi-même triste. Il n’y a pas de saison plus propice qu’une autre à sa réalisation. Tout ce qui peut entrer dans un frigo convient à sa réalisation. L’ananas, les Gummi Bärchen et le pot de yaourth. Le lait qui reste au fond d’une tasse en émail, prête à réchauffer sur la taque. Voici deux itérations possibles de la tenture triste. Ne pas réfléchir. Ouvrir le frigo et choisir une première itération. Fermer la porte. En choisir une seconde. Ensuite, et je veux dire par là aussitôt ensuite, plus d’une seconde serait déraisonnable voire dangereux, ensuite on oubliera le frigo de sorte qu’il ne sera plus là. Plus là le frigo, plus de glouglou ni de ronron, plus rien qui rappelle son existence froide. On oubliera le frigo et on s’efforcera d’être plusieurs. On se mettra torse nu et à plusieurs. On s’appellera d’un bout à l’autre de la pièce en étant plusieurs. On se dédoublera, se détriplera, se quadrulera. Une fois parvenu à 4 sois, on reculera d’un pas pour n’être plus que trois. Simultanément – la simultanéité est cruciale, tout décalage pernicieux – chacune des trois jètera dans un grand sac poubelle, un à un, tous les ingrédients. En jetant, on se lamentera. On se lamentera à trois voix mais en même temps – tout canon sera prohibé – de la disparition des ingrédients. Cette lamentation triste comportera trois étapes tristes : le deuil ; les louages ; le reproche. On veillera à ne jamais reprendre son souffle.Si on y est contraint pour des raisons de santé (oxygénation du cerveau, asthme, allergie au détergent) on comblera le vide ainsi constitué, le creux ainsi creusé dans les lamentations par des syllabes aléatoires qu’on prononcera en inspirant. La ! La ! Hi ! Hi ! Ce qui se passe ensuite vous surprendra. 

Rituel de l’autre porte pour sortir

Tu prends trois briques de légo rouges et tu vas aux toilettes.

S’il y a un loquet, ne le ferme pas. 

S’il y a une lumière, ne l’allume pas.

Ferme l’abattant et assieds-toi sur les toilettes. 

Prends le temps d’écouter les bruits : quand ta déglutition, ou l’air dans ton système digestif deviennent les sons les plus présents, le rituel commence.

Prends la première brique de légo dans ta main droite et dit à haute voix : « lundi mardi mercredi je ne suis pas sorti ». 

Jette la brique au loin.

Prends la deuxième brique de légo dans ta main droite et dit à haute voix : « jeudi vendredi samedi je ne suis pas sorti ». 

Jette la brique au loin.

Prends la dernière brique de légo dans ta main droite et dit à haute voix : « dimanche je ne suis pas sorti, dimanche je ne suis pas sorti. » 

Jette la brique au loin.

Prends le temps d’écouter les bruits : quand les bruits de voisinage, de tuyauterie, de circulation automobile ou de vie animale deviennent les sons les plus présents, le rituel s’achève. 

Cherche à tâtons les trois briques, prends les dans ta main droite.

La porte est ouverte : sors des toilettes.

Mon visage, ton visage

Un miroir, une corde, des souvenirs de vacances. Ce jour-là, tu ne ressembles pas à ton père. Tu viens de faire un peu de gym sur ton tapis. Fonctionne encore mieux la radio éteinte.

Prends le miroir et la corde, amène-les dans la pièce la plus lointaine, amène-les dans la pièce la mieux cachée, marche jusqu’à ce que tu sois confonté à un mur infranchissable, à une fenêtre haute ou à une porte donnant sur un espace public. Une fois parvenu au bout de chez toi, cherche la meilleure cachette, placard, dessus d’armoire, dessous de canapé, malle, boîte, coffre à jouet. Ranges-y le miroir, tain vers le bas. Mets-y la corde, roulée sur elle même comme une pelote serrée.

Cesse de penser à ces objets. Oublie que tu les as mis là. Oublie tes souvenirs de vacances, la lumière qu’il faisait ces jours-là, le souvenir de l’impression que t’ont laissé ces jours-là. Oublie que tu as initié le rituel. 

Le rituel se termine quand tu retrouves par hasard la corde, par hasard le miroir que tu avais caché, ou bien quand quelqu’un d’autre le fait après que tu sois parti.

Ton visage est devenu celui que tu imagines que tu possèdes. Il est celui que tu vois dans le miroir quand tu te regardes dans le miroir.

Protokools confinés – 1

Rêves & animaux – atelier zanzibar via jitsi du 26/03/20

Stuart, Léo, luvan

1.

  • chacun raconte un rêve qu’il a fait récemment
  • à partir de ce rêve, on a une 30 min pour écrire une histoire

2.

  • les animaux dans la ville en temps de confinement
  • carte de tarot
  • 30 min

Léo 1

Ce dont je me souviens du rêve de Stuart : anniversaire de Marius, on lui offre un éléphant, il faut le faire monter dans un escalier en colimaçon, appartement soviétique, il fait sombre, mais finalement on vit bien avec cet énorme animal dans l’appartement.

On a recommencé à vieillir.

C’est venu comme ça, un matin, Olga a regardé le calendrier, celui avec les photos d’animaux, elle a tourné deux, trois pages, et s’est arrêté face à deux marcassins qui se grimpaient dessus, elle a dit : c’est demain.

Demain quoi ? a grogné Olaf.

L’anniversaire du petit.

Le petit a levé un œil de son bouquin, il relisait la Flexion de la phrase verbale à l’époque alfrédienne tout en surveillant la cavale du couvercle de cocotte : quand l’ébullition reprenait, il se mettait à glisser tout doucement, millimètre par millimètre, jusqu’à se jeter, de toute la hauteur de la cuisinière, sur les dalles en béton. Osgür et Ornelle ont posé leur ouvrage presque en même temps, leurs gestes en miroir, ils s’asseyaient toujours face à face et avaient fini par gagner ça, cette précision, cette expertise dans la chorégraphie. Ils avançaient au même rythme dans leurs broderies, seules les couleurs changeaient. Oncle Oscar, Olie l’Oursonne et Otto d’en Haut étaient allongés et dormaient, ou bien faisaient semblant de dormir, sur les trois surfaces planes prévues à cet effet dans la cuisine. On pouvait pas leur en vouloir, c’était leur tour, et leur tour passerait bien assez tôt.

Olga a répété, catégorique : c’est demain. Puis, un ton plus bas : et peut-être même aujourd’hui, peut-être aujourd’hui même. Puis, à l’usage de ceux qui n’avaient pas les yeux fermés, ceux dont c’était le shift dans la cuisine, elle a ajouté : va falloir lui trouver un cadeau. Bouche-toi les oreilles, petit !

Petit O à hoché la tête comme ça, exaspéré peut-être, peut-être juste chassant une mouche, et il a replongé le nez dans son tome comme si de rien. Comme s’il en avait rien secouer que le temps se soit remis à passer. Comme si vieillir, grandir, ça n’était plus très important, finalement, ou alors bien moins que les subtilités syntaxiques du vieil anglosaxon.

Mais pour nous tous, c’était déjà trop tard.

Ornelle, qui a l’ouïe la plus fine – c’était elle qui se réveillait, la nuit, quand la veilleuse du chauffe-eau faiblissait, elle qui relançait le brûleur à temps avant que ça ne s’éteigne, avant qu’on ne gèle tous ensemble, que la chaleur humaine ne se dissipe – a levé son aiguille, pincée entre deux doigts, et a dit : ça monte ! Et Osgür, qui est le plus sensible aux règles de bienséance, s’est peigné avec les doigts de sa main gauche pour que, quand on allait sonner à la porte pour la première fois depuis la dernière fois, l’impression soit la bonne. Olie l’Oursonne a mis un grognement entre deux ronflements.

Olga a dit : qui a passé la commande ?

Olaf a cherché un coin où tourner son regard, un endroit où poser ses yeux sans rencontrer d’autres yeux. C’était pas la première fois qu’il tentait le coup et il était pas particulièrement surpris de ne pas y arriver. Oncle Oscar a émis un pet sifflant, menaçant, et Otto d’en Haut a grommelé : le trapèze ! Ne laissez pas filer le trapèze ! Sauf que ça comptait pas, vu qu’il était endormi et qu’il devait encore rêver à l’Amérique latine.

Olga a attendu le retour du silence cuisine, qui est fait de cent petits bruits d’ici et d’échos de tous les bruits derrière tous les murs, puis elle a ajouté : j’espère que c’est pas quelque chose de trop encombrant.

À ce moment là ça a frappé à la porte. Douze coups. Le petit a fini par tendre le bras et faire jouer le verrou. On pouvait tous voir qu’il avait pris un coup de vieux.

Léo 2

10 de deniers : accroissement, richesse, biens ; opération commerciale osée réussie.

Au parlement des corbeaux, on ne s’agglutine pas par affinité politique, l’emplacement des nids n’a aucune signification. Il n’y a pas non plus de perchoir, ni de micro : chacun y croasse à altitude égale et à à peu près le même volume sonore. Les peupliers de printemps tardent à laisser repousser leurs feuilles et la structure de la chambre est à nu. Ca ne dérange personne, tout le reste de la zone est désert depuis plusieurs semaines.

La première fois que je me suis arrêté en dessous, j’entendais sans rien voir, sans comprendre d’où venait le barouf. D’où, entre le campus du CNRS et la zone d’activité de Schiltigheim, on subissait ce bruit de sous-bois, ces grincements de gésier, cette entrelacement de croac croac. C’est qu’ils étaient planqués dans les feuillages, alors, qu’ils faisaient encore leurs petites affaires en catimini.

Le dimanche, quand on se balladait par là-bas, on avait l’impression d’être dans un film de SF, moitié soviétique, moitié cyberpunk, moitié postapo. Le lac paysagé, l’hôtel quatre étoiles pour cadres sup sup, l’hélico sur le toit de la banque, et puis juste derrière, les champs de maïs à cochon et les collines avec les bleds alsacofachos, les bosquets sauvages qui dénonçaient la présence de bunkers semienfouis, totalement inextircables. Les gars de la cité, aux beaux jours, amenaient des barbeucs et des scooters sur les parkings de l’Espace Européen de l’Entreprise. Les corbeaux laissaient faire. Ils étaient là depuis longtemps. Ils avaient le temps.

La dernière fois que je suis passé, le dernier jour où on avait encore le droit de faire du vélo, les cris m’ont cueilli cent mètres plus haut. Dans les branches nues, on pouvait compter les nids. Le parlement, moitié perché, moitié envolé, avait gagné en représentants et faisait un gribouilli en noir sur gris, quelque chose d’illisible et d’un peu inquiétant.

Un corbeau s’envole du sillon, une proie un peu lourde dans le bec, on dirait qu’il galère avec la taille de ses ailes, avec le poids plume de ses os pleins de rien, c’est du mouvement de précision, au contraire, de l’expertiste finissime, la maîtrise shaolin du geste parfait, en deux coups le piaf s’arrache du sol, il décolle, il vole, nique toi bien, la gravité.

La chaîne de mon vélo grince, j’ai les yeux qui piquent, le ciel est percé de mille trous noirs minuscules, nous sommes pris dans nos tours comme dans des pigeonniers, et les corbeaux, les corbeaux sont encore là.

luvan 1

La terrasse.

Le khamsin y a soufflé un sable doré le matin, brunâtre le soir, invisible et blanc au midi. Lorsque le vent se calme, 50 jours syndicaux plus tard, je sors pieds nus, en dépit des scorpions, pour la sensation de plage. Il fait chaud. Deux semaines que les ventilateurs sont en rade. Des rats escaladent l’intérieur de la gaine technique dans de petits tacs-tacs. Une théière électrique bleu roi est posée là, au milieu, à côté de l’arbre à kumquats, imberbe de poussière, lisse comme le monolithe de 2001 L’Odyssée de l’espace. Une voix radiohystérique low-tech provient de la terrase voisine, dont nous sommes calfeutrés, depuis leur côté, par une barricade de joncs secs. Au loin, le muezzin siffle un long gémissement crépitant. Deux semaines que la sono de la mosquée sonne comme l’intérieur d’un vieux tram bruxellois. Je soulève la théière. Elle est vide, neuve, pas une éraflure. Si le vent l’avait portée jusqu’ici, elle serait ensablée, avachie sur le flanc comme les raffiots tristes du lac Baïkal. Autre chose l’a portée là.

La cuisine.

Il y a quinze jours, le frigo a rendu l’âme dans un hoquet. On a tout mis dans une glacière, mangé ce qu’on a pu, jeté le reste. Des mygales crochues crapahutent dans la gaine technique. On entend des insectes la nuit. Ce matin, j’ai délogé une scolopendre de ma basket. J’ai pété une dalle en l’écrasant. J’ai brûlé le reste, qui s’est longtemps débattu dans de grands déhanchis de colonne vertébrale, comme me l’a appris à le faire la tante d’Ephehia. On vit d’huile d’olive, de sel et de pains de ration. Ce matin, j’ai trouvé une machine à espresso, rouge comme une mustang, sur le plan de travail. Les autorités nous ont déposé des caisses en hélico. De l’huile d’olive, du lait concentré, des médocs et des biscottes.

Le salon.

Une télévision neuve, câbles Hi-Fi et tout le tintoin, comme dans les publicités des années 2030. Et toujours pas d’électricité.

La chambre.

Deux mois sans électicité. On n’entend plus la prière. Je la fais malgré tout par habitude, dans l’espace qu’il me reste entre les monceaux de petit électroménager. Le vent a repris, pâtine le tout comme un lavis de jaune d’œuf. Je suis dans une nécropole, une ruine Maya. Les autres sont partis ce matin et c’est moi qu’on a choisi comme gardien. Le sol sent le sable et la pile oxydée. Dans la ville, les autorités ont recensé 200.000 machines et 15.000 individus. 200.000. La population de Paris au XVIIème siècle. Heureusement qu’il me reste mes bouquins d’histoire.

luvan 2

« Vous savez, cette histoire ? » insiste Vera. « Cette histoire de coyote qui traverse une rivière sur le dos d’une tortue et la bouffe une fois parvenu de l’autre côté ».

Tout le monde s’esclaffe, surtout les trois infirmères hopi.

« Un coyote ne peut jamais manger de tortue » dit l’une d’entre elles.

« Trop de carapace, pas assez de prise aux dents », renchérit Ernesto.

Le garde de sécurité nous a rejointes dans la loge pour nous prévenir de l’évacuation, un chouïa trop tard, et nous sommes toutes coïncées ensemble, à la lumière strass-et-paillettes des bulbes jaunes.

Vera manœuvre avec agacement sa chaise roulante pour la garer plus perpendiculairement à la table de maquillage, un geste de colère que je l’ai vue faire plusieurs fois.

Les loges de la maison de retraite communautaire se trouvent en entresol. Depuis la petite fenêtre grillagée donnant sur le trottoir pentu, nous voyons depuis ce matin un drôle de spectacle. Une femelle coyote aux pis pleins s’est installée pour mettre bas. La fenêetre est encastrée, en effet, dans une sorte de niche en briques jaunes donnant sur la 63ème. D’ordinaire, en proviennent les pets peu raffinées des vieilles grosses bagnoles, les cris des gosses qui descendent la pente jusqu’à la public school, puis la remontent le soir dans des rires fatigués et machinaux. Depuis le Shelter, rien. Sauf ce matin où l’étrange jappement mâtiné de miaulement de la coyotesse nous sert de berceuse angoissante. Quand mettra-t-elle bas ? Ses pis sont pleins.

Vera boude sur son siège métallique, qui grince sous son poids. Et puis comme d’habitude depuis le début de la quarantaine, quand c’est le silence depuis plus de trois minutes, tout le monde me regarde, comme si c’était à moi d’écrire la suite, de distribuer les rôles et les répliques. Comme si j’étais toujours en charge du spectacle.

Je sens la sueur glisser entre mes seins. Ça châtouille.

Heureusement, Tonio est pris d’une formidable quinte de toux et la coyotesse se met à chanter en mi. Si j’en sors vivante, promis j’abandonne la mise en scène et me remets au sound design.

« Men ! With your… sales ! » éructe Emilia, toujours bloquée sur son solo.

Et elle rit.

Je sens que je devrais dire quelque chose, les encourager d’une manière ou d’une autre, mais Tonio va crever et la coyotesse mettre bas. C’est inéluctable.

J’installe l’escabelle brimballante sous la fenêtre et grimpe pour mater l’animale, son très long museau, ses beaux yeux d’ancêtre omnisiciente. Lorsque je pose ma main à plat sur la vitre, elle la lèche.

« Parfois, c’est l’inverse qui se produit » raconte Renee, qui n’a pas voulu ôter son maquillage ni son costume et ressemble toujours à une flapper de la Prohibition. « Parfois, ce sont les migrants qui tuent leur coyote ».

« Here we go again ! » gémit Ernesto en anglais. « J’en ai vraiment marre de vos histoires de traversée ».

À la fois, que reste-t-il d’autre ?

La coyotesse met bas dans un hululement de grand-duc.

Stuart 1

C’était un rêve. Une image, un flash back en noir et blanc, comme dans certains films, vous savez ?

« L’idée du trapèze », me susurre l’ange à l’oreille.

J’entre dans le rêve comme on ouvre les yeux au réveil, comme on entre en coulisse après le spectacle. Sadako est là, qui me regarde, me scrute, jauge mes capacités à passer d’un écran à l’autre, de la réalité intérieure à la réalité extérieure. Par son regard elle me guide, coordonne chacun de mes gestes ; je sens les fils qui me tiennent et font se mouvoir mon corps sous le chapiteau monochrome.

« Nous sommes en direct de Caracas », reprend l’ange.

Je lève le regard, absorbe le plafond au creux de ma rétine, dévore la pellicule et le script d’un clignement d’yeux.

Autour de moi, des explosions de lumière, flashs de spectateurs fantômes.

Le film vacille et se brouille, millions de pixels qui soudain floutent le décor, les distances, le jeu auquel on m’invite.

Sadako arque le nylon des fils qui me propulsent contre l’échelle apparue là, entre deux lézardes cathodiques.

« Il est temps »

L’ange m’invite et me conduit vers l’escalier de fonte ; chaque barreau est un trait fiché dans le réel, une suture, une façon de faire tenir ensemble ce qui tremble et chancelle.

Coupure – reprise – le film saute et s’emballe.

Je me tiens au-dessus du vide.

L’ange affiche un sourire de trampoline, un regard qui me berce et m’agite à la fois.

Le trapèze est un jeu auquel il est possible de s’adonner toute une vie, pour peu que l’on sache déchiffrer les saccades de l’écran et l’ombre des personnages secondaires.

L’ange, et Sadako.

Mes meilleurs amis.

« Il est temps. Nous sommes en direct »

Mes mains enroulent le fer, mon corps s’aligne avec l’idée du vide en dessous de moi. Il n’y a pus de nylon pour me tenir, plus de fantômes à satisfaire, plus d’ange pour compter mes points de vie ni me dire les règles du jeu.

Mes doigts serrés autour du plein, par-dessus le vide.

Si je tombe, je pourrai retourner chez moi.

Tour de manège, je m’élance.

Au loin, les sirènes de Caracas.

Stuart 2

Les animaux dans la ville

Le soleil

C’était comme un petit défilé de lumière, une foudroyance douce et chaude froufroutant le long des piliers de théâtres et du pavé des rues anciennes. Un tunnel une colonne un rassemblement ordonné et foutraque de chants et de cris, de grognements et de souffles fauves. Ça dévalait depuis le Jardin des Plantes et puis dans tout Paris, dans les parcs abandonnés et les places aussi vides qu’un bord de mer hivernal, sur le bitume des routes foutues remplies de plantes sauvages. Et tout ce petit monde dévoré prenait sa revanche, fantômes goguenards du vieux Panam, spectres kawaii et pîtres d’un passé de bombes, de guerre et de famine.

On était le matin.

On était au 232e jour du confinement,

Un chiffre qui sonnait assez bien pour que les animaux mangés du siège de 1870 s’éveillent en masse pour s’en venir chahuter la ville évacuée. On ne savait plus très bien s’il restait des humains à l’intérieur des murs, ça non. On ne savait plus très bien s’ils avaient existé un jour. On se souvenait de l’orage des canons et des couteaux de boucher, des assassinats en direct et de la rafle du zoo.

Mais des humains d’aujourd’hui, non. Peut-être que tout s’était arrêté une fois la ménagerie vidée et le dernier ours débité en tranches fines de carpaccio exotique, une fois le dernier chat flanqué de rat servi à la clientèle huppée d’un restaurant grand luxe.

Miette, elle, se souvenait.

L’éveil des animaux, ceux de la grande ménagerie, ceux du Jardin d’Acclimatation, l’avait tiré de son sommeil sans rêve.

Une gosse, une gamine, mal mise et tuée par trois mois de sièges. On avait poussé son corps au pied d’un tas qui faisait trois fois sa taille, un tas de choses humaines qu’on ne regardait plus et qui s’en allaient remplir les trous creusés pour eux dans les rues alentour.

Miette, donc, se souvient.

En plein soleil, nimbée d’aurore et de la joie du jour qui commence, elle marche dans la ville moderne et lisse, blocs blancs sur blocs sables, routes grises et nettes malgré l’insurrection végétale. Elle suit le flux doré des animaux heureux, les canards bien vivants qui partent à l’aventure hors de la jungle des cours, les coyotes venus du Mexique par de petites embarcations de fortunes et arrivés dans la nuit.

La môme chante et s’improvise meneuse de revue, danse une danse qui n’en finit plus, libre et spectrale, fluide et animale, la petite gosse qui n’a pas vu grand-chose du monde ni de la douceur humaine, la gamine morte trop vite mais bien assez tôt au regard de ceux qui tiennent les rennes et les banques, la celle qui a aimé et aime le chant au matin des oiseaux et les barrissement, lointains, depuis son coin de rue pourri, des éléphants du Jardin des Plantes, tout prêts, si près, de l’éléphant géant de la Bastille qui la cache aux yeux des passants, du plâtre rêche qui s’égrène entre ses doigts et des vœux qu’elle prononce quand plus personne ne la chasse : « un jour, j’aurais un éléphant. »

Voyager après

1.

– 30 mn
– chacun écrit un texte sur l’après confinement
– thématique « voyager après »
– on tire une carte de tarot par personne qui servira de guide & donnera la couleur
– on debriefe au bout d’une demi-heure

textes de Stu, luvan, Léo et Stéphane

2.

– deuxième round de 30 mn
– nouveau tirage de carte
– on commence tous les textes avec « on nous a dit que le dehors n’existait plus »

textes de Stu, luvan et Léo

Stuart 1 – La Maison Dieu

FORTERESSE

On nous a dit que le dehors n’existait plus, qu’il s’agissait de se concentrer sur nous, nos vieux, nos jeunes, notre tissu social et nos usines, nos champs et les paroles de nos chansons, notre histoire, notre fierté nationale et tout ce qui nous avait fait de nous le peuple de France.

On nous a dit de ne plus regarder au-delà, de locker notre regard sur le pain qui sort du fournil du boulanger et la bouille joviale des artisans, le labeur des soignants, la probité des forces de l’ordre. On nous a dit de reconstruire ensemble, comme en 45 avec des textes nouveaux et des programmes heureux. On nous a dit de ne plus faire confiance, qu’on nous l’avait bien dit, qu’après le Rhin, qu’après la Manche ou la Méditerranée, que passé les Alpes ou les Pyrénées vivent les monstres des abysses et les serpents de mer.

La langue ne se pratique plus que dans nos murs. La langue est le ciment qui scelle et la pierre qui broie quiconque tenterait de venir nous faire croire autre chose que le dedans, l’ici, la frontière protectrice et maternante. Il y a des mots qui s’n vont petit à petit. Ils reviennent parfois la nuit entre deux rêves, entre deux tournées du Veilleur qui nous rappelle que tout va bien, qu’il est 22h, minuit, trois heures et que tout est calme, que nous pouvons dormir.

Il y a des mots qui trainent encore dans les vieux livres et les chansons étrangères dont certains ont gardé les sons par devers les règles du Nouvel Ordre. Des mots qui sonnent creux et pleins à la fois. Voyage. Voyager. Foreign. Foreigner. Forains. Traveler. Pilgrim. Passenger.

Autant de traces qui nous rappellent malgré tout à quel point nous avons été proches. Comment, au gré de la poésie et de la musique pop, des migrations et des règnes batards, nos voix se sont mêlées. On est des gosses errants à qui le voyage est définitivement interdit, à vivre dans les repliques de nos amours passées.

I am a passenger
And I ride and I ride…

Stuart 2 – Le Jugement

On nous a dit que le dehors n’existait plus.

Je regarde la mer, ça bouge vers le dedans, vers le dehors.

Je me dis que peut-être le monde a commencé comme ça, avec la vague qui vient et qui s’en va et qui, pourtant, reste : immuable.

Nous avons inventé l’idée de la frontière en quittant la mer, l’idée de la paix et d’une certaine contemplation qu’on nous a déclinées en églises, en promesses, en édens : en jardins.

La mer est un jardin. Le premier.

Je me tiens devant-elle avec Sev qui me broie la main et chacun de mes doigts forts, si forts que je sens toute ma colonne vertébrale s’ancrer profondément au sol.

La mer est un jardin et j’en suis le pilier, la trame de chair et d’os.

« Faut que je me réinvente », me dit Sev.

Elle hésite, tangue. Et pourtant, elle est immuable.

Et pourtant son étreinte reste.

Demain elle prendra la mer et me laissera là, plantée sur le rivage comme une femme de terre-neuvas. Elle partira et l’on brulera ses biens, sa maison, ainsi que tous les biens et possessions des personnes qu’elle a le plus aimé. C’est son choix. Partir. Quitter. Rejoindre le par-delà l’horizon. Et nous acceptons d’en payer le prix.

Pendant qu’elle naviguera dans le jardin, nous – moi – j’irai rejoindre une autre terre, un autre clan. Peut-être.

Pour les autres, ceux qui restent, je serai fantôme, revenante, invisible. J’errerai dans leurs champs, autour de leurs maisons et nul ne m’adressera plus la parole.

On nous a dit que le dehors n’existait plus.

Et pourtant Sev persiste à y croire et à désirer le rejoindre.

« J’ai besoin de toi pour être vivante », m’at-elle glissé à l’oreille la nuit dernière entre deux mèches de cheveux en vrac.

Les enfants me regarderont bizarre, à eux aussi on leur chuchotera à l’oreille des choses, mais en plein jour. Les adultes les éloigneront.

Mais tu sais, Sev ? Que je lui ai dit.

Moi, je serai heureuse.

Je ne t’attendrai pas parce que je saurai que tu es ici, comme le mouvement de l’eau, comme le sable qui tantôt est à ciel ouvert, tantôt dans les profondeurs.

J’habiterai ce jardin.

Regarde : j’ai déjà commencé à changer !

Et je desserre un à un ses doigts rivés aux miens, je les desserre et je lui montre la transparence qui prend mes ongles et mes phalanges, remonte le long du bras jusqu’au coude.

« Je rejoindrai le jardin, pendant que toi, tu seras sur la mer »

Stéphane 1 – Un point, c’est tout

Un point, c’est tout ce qu’il faut pour tracer les lignes d’un parcours. C’est comme une donnée à prendre en considération, la joie d’un œil au-dessus des toits. Lapp n’a plus l’habitude. D’abord faire un pas. Un autre. Et pourquoi pas ? Ça bondit dans sa tête. Hop. Voilà. L’air est propre sous le ciel. Promis, on ne l’y reprendra pas. Agoraphobe en fin de confinement, ça ne s’invente pas. Devoir réapprendre à faire comme les autres, à marcher d’un point à l’autre. Un air lui revient, un air italien : « Un jour, sans valise, la lune fit un saut, pour regarder la terre de moins haut. » Son mantra. Lapp était bien, dans son appart, dans son cocon. Son refuge. Se faire livrer, comme d’hab, avec les voisins qui ne lui en voulaient pas, de ne pas sortir, de ne pas aimer ça. Et puis tout le monde a fait comme lui, et il n’a pas aimé ça. Enfin, pas trop, finalement. Bien sûr, au début, comme un enchantement, comme une joie, l’idée que tous feraient pareil, maintenant. Restez chez soi. Ne plus sortir. Jamais ou presque. Être la norme. Être l’exemple. Et puis, au fur et à mesure des semaines et des mois, les mots et les conseils, pour tous ces gens qui n’en pouvaient plus de regarder leurs murs. Est-ce qu’ils pensent que ça lui plait, à lui, de s’en contenter ? L’agoraphobie, ce n’est pas la peur des grands espaces ou de l’extérieur. C’est celle de ne pas pouvoir trouver aide ou sécurité si un problème se présente. La peur de ne pas pouvoir s’échapper. Alors tous ces gens enfermés et qui s’en plaignaient, ça a fini par lui peser. Et les murs se sont rapprochés. Et rapprochés. Et dehors, c’était comme une porte, pour la première fois, et il n’aimait pas ça. Vraiment pas. Et il s’est demandé ce qui clochait chez lui, s’il faisait exprès de ne rien faire comme tout le monde. Repenser à la lune, le point tranquille au-dessus des toits, et encore faire un pas. Non décidément, ça ne passe pas. Ne plus être bien nulle part, ni dehors ni chez soi. Et passent les semaines et les mois. Et puis, enfin, c’est fini, il faut sortir, et s’y frotter. Au dehors. Au froid. A l’air propre sous le ciel lavé. Se forcer à recommencer. Chercher du pain, c’est pas si compliqué. « Un jour, sans valise, la lune fit un saut, pour regarder la terre de moins haut. » Le monde reprend sa course et tout a changé. Et pour Lapp, tout est à recommencer. Un point, c’est tout ce qu’il faut pour tracer les lignes d’un parcours. Sans nuage, c’est plus facile. Sans bruit autour, c’est plus facile. Un pas. Et un autre. Bonjour, je voudrais une baguette. La lune en roue de secours. Déjà penser au retour.

Léo 1 – La Papesse

Le train s’arrête un peu avant Rennes et ça n’est vraiment une surprise pour personne, il ralentissait beaucoup, peinait à reprendre une vitesse de croisière, une vitesse d’avant.

Le dernier coup de frein les fait brinquebaler tous les trois, il est aigu et très bruyant, Ulysse pense à des dents qui se serrent et qui grincent. Le compagnon d’Ulysse, son ex-compagnon, comme si ex était une syllabe suffisante, comme s’il suffisait de barrer un mot d’une grande croix rouge pour qu’il change complètement de sens, son ex-compagnon, Pénélope, disons, se défonçait les chicots, la nuit, pendant le confinement. Ca avait commencé à semaine deux et n’avait cessé d’empirer.

L’enfant rit, excité par la secousse, amusé par l’arrêt, il approche le nez de la vitre brillante sans oser la toucher, une main crochette l’autre comme on le lui a appris. Il n’y a rien à voir, c’est à dire le monde dans sa beauté imprévue. La vieille qui voyage avec l’enfant s’évente avec un flyer du confinement, une constellation de pictogrammes ésotériques accompagnés de notices de plus en plus longues et abstraites. Entre Ulysse et les autres il y a deux places vides, trois en comptant celle sur laquelle elle a posé son sac. Elle se demande où sont passés les rideaux, elle croit se souvenir de ces lourds voiles rèches qui permettaient de fermer les compartiments des Corails comme des boîtes, elle croit se souvenir de l’énervement contagieux qui gagnait de proche en proche les passagers de trains à l’arrêt, avant.

Ulysse regarde ce que regarde la vieille, qui regarde ce que regarde l’enfant, les voies, le ballast, les tours d’aiguillage, les ponts pierre et béton, les jardins, les pavillons pouilleux, les tours à demi montées, les lierres jaunes, et par-dessus tout ça le soleil écrasant de la mi-juin, la canicule qui fond les couleurs et chasse les passants. Aucun des trois humains ne tend l’oreille, aucun d’eux ne soupire en attendant l’hypothétique annonce du chef de bord.

Ulysse tourne la tête quand elle se rend compte que la vieille à présent la fixe, la dévisage. Que voit-elle ? se demande-t-elle. LA vielle a les yeux gris et les sourcils, les paupières peintes, elle ne feint pas d’être polie, elle étudie Ulysse et quand elle parle révèle ses vieilles dents, authentiques et jaunes, elle dit :

« Nous nous sommes rendus compte que nous vivions tous dans un seul pays, sans limite, sans frontière, et ce pays s’appelle capitalisme. »

Léo 2 – La Papesse

« On nous a dit que le dehors n’existait plus, qu’il fallait qu’on s’y fasse, à cette idée, que tout ce qu’on chierait resterait avec nous, pour toujours, qu’on serait éternellement la source de nos propres malheurs et qu’aucun ailleur, aucune zone vide, aucun monde meilleur ne nous attendait nulle part. J’avais sept ans et tous les adultes me paraissaient vieux, inquiets, menaçants. La plupart du temps il n’y avait pas de lumière. On est resté enterrés huit jours, mais ce genre de temps n’a pas de mesure. »

La vieille montre à Ulysse ses deux mains ouvertes, comme si ces paumes d’un blanc rosâtre, presque nacré, ces paumes étranges et belles étaient l’intérieur d’une coque rejettée par la mer, étaient un petit livre cousu dans sa chair, était une carte.

« J’étais avec l’oncle, avec les cousins, on avait fait notre terrier dans le coin d’une des plus grandes salles et on allait chier par trois, toujours par trois, serrés les uns contre les autres. Les adultes et les enfants puaient autant, les uns plus aigres, les autres plus gras. On regardait tout ce qu’il y avait à voir dans le noir, on écoutait le silence, les bombes ont cessé de tomber le deuxième jour, c’est ça le bruit de la guerre, pour moi, le vrai bruit de la guerre, pas ces blablas à la radio du matin jusqu’au soir. »

Elle retourne ses mains, ses pattes usées, ses parchemins, migration de kératine, fleurs de cimetière, os, tendons, poils minuscules et argentés, tout ça tremble légèrement, une serviette sur un fil à linge. À la base du pouce il y a un tatouage pâli, presque effacé, grand comme une pièce de 5 cents, et Ulysse se penche, elle ne distingue pas bien.

« C’est une baleine, dit l’enfant. Le gros poisson de la Nona.

– Oui, fait Ulysse, je la reconnais maintenant. La baleine de Jonas, celle de Pinocchio. »

Elle a pris la main de la vieille dans la sienne sans vraiment s’en rendre compte, peut-être dans la secousse qui a remis le train en route, qui a remis le paysage, derrière la vitre, en mouvement, et c’est une surprise de sentir ça et de ne pas savoir encore mettre de mots sur ça. Ulysse pense à Pénélope, aux salières de son enfance et à la méduse énorme, silencieuse, qu’elle a failli heurter de plein front au cours d’une apnée, il y a des années de cela.

Le contact se défait et la vieille conclut :

« Au bout de huit jours, les militaires ont déblayé l’accès et la lumières est revenue, on est sortis, toujours par trois, on a monté les échelons des puits, les bruits, les odeurs nous attendaient, intactes, mais comme on nous l’avait prédit, le monde, dehors, n’existait plus. »

luvan1 – L’ermite

Sur le flotteur du catamaran, les silhouettes défilent, le pied de l’une dans le mollet de l’autre. Je pense au mot « ribambelle » et me demande s’il en existe encore qui s’appellent Silhouette, du nom de leur ancêtre parti sitôt venu, ou si, comme Hitler, ce patronyme a disparu. La chance, roh la chance de se nommer Silhouette. Partir sitôt venu, indétectable et moite comme une anguille. Pour la première fois depuis des moi, la cabine tangue sous des tam-tams de pieds au lieu du blams dégobillants des lames de fond. Les silhouettes arriment le navire au ponton, je le devine au crissement que fait le polymère contre le béton. L’ombre de mouettes se mêle à celle des pieds. Puis le silence et l’on cogne poliment à la porte. Tous ces mois sans pouvoir accoster nulle part et soudain ces ombres noires et trappues prolongées d’ailes papillonant, comme des pixies, veulent me voir. Je me projète de leur côté de l’expérience – que s’attendent-elles à voir ? Et me sens soudain minotaure. Minoraure dans un grand pull marin troué. Minotaure salé aux lèvres croutées. Ce que les anges verront : une cabine trop rangée. Des lits vides. Je les ai gardé longtemps pleins, ces lits, avant de remonter les corps, lourds, par des winches et des poulies. Avant de rendre aux morts les hommages de poiscaille des funérailles marines. Les silhouettes entreront, c’est inéluctable. Elles prendront corps pour moi. Je prendrai consistance pour elles. La radio hoquette et soudain crépite une longue litanie en hindi, avant de se replacer sur la météo en langue des colons.

J’ouvre.

Elles ont les yeux fatigués et de très longs sourires.

Ils ont les mains tallées et une forte odeur de gingembre.

luvan2 – Le jugement

On nous a dit que le dehors n’existait plus. La sirène hurle et nous courons sur les docks. Les longues traces délavées des chiures de goélands racontent l’absence des gros porteurs, le souvenir des pêches de nuit à la lumière livide des hauts projecteurs.

Nous sommes ce que racontent ces chiures erratiques, par strates. Manuscrits de la mer Morte.

La sirène sonne et nous sommes à l’air libre. Des larmes sitôt givrées sur nos joues rasées. Nous sommes des bébés neufs à la peau molle et potelée.

Nous courons comme la foule exacerbée, joyeuse de colère, du cuirassé Potemkine. Pareillement assortie et saccadée. Nous sommes la foule des dockers.

Nous toussons machinalement dans le froid.

Nous somme la houle qui glisse sur le guano odorant.

On nous a dit que le dehors n’existait plus alors d’où vient ce bâtiment fumant ? Où étaient les raffineries et les larges frigos accrochés de bernics ? Où étaient jusqu’ici les fantômes placides des usines à viande maigre, des brises-glaces et des ouvreurs de la voie du nord ?

Nous stoppons au bord abrupt de la rade, que des clapotis embrassent de leurs langues de mercure. Depuis le château, on dirait sûrement l’arrêt spectaculaire d’un contingent d’athlètes nains lors d’une cérémonie d’ouverture des J.O. Les deux remorqueurs tanguent jusqu’à leurs amarres. Nous touchons, incrédules, la coque froide du mastodonte. Nous humons le carburant. Nous sommes en colère.

Sur l’île de Pâques, on adorait les oiseaux migrateurs car ils venaient, partaient, revenaient. Et il n’y en avait pas d’autres. D’oiseaux. Alors on adorait les oiseaux.

On nous a dit que le dehors n’existait plus et nous sommes en colère.

Les marins descendent, harassés et moches. Ils sentent le tabac froid, la migraine et la sueur. Nous les touchons, incrédules.

Tout recommence et nous sommes en colère.

Corodico

Vous avez envie de savoir ce que c’est qu’une bataille coronavale ou bien qui est coronapoléon ?

Allez remplir le coronadico, c’est par là :

http://corodico.zanzibar.zone

 

c’est open zanzi bar !

abondez, complétez, copiez, collez…

tout est à vous (rien n’est à eux)

avec des safe bisous de

zanzibar.zone

Malraux, novembre 2019

Zanzibar était à la médiathèque Malraux de Strasbourg samedi soir, sous
la forme luvan, Alain & Sabrina (+ Léo à la modération), pour une table
ronde autour des futurs de la démocratie. On a essayé d’y travailler un
peu le rituel « rencontre d’écrivains ».

Quand la démocratie se conjugue au futur…

Selon vous, d’où viendront les changements dans l’organisation des relations humaines à l’avenir ?

[Essayez de retenir la première idée qui vous vient à l’esprit et notez-la au verso de ce papier en le MOINS de mots possible]

des évolutions du travail

la pénurie des ressources

de la prise de conscience des êtres humains

les liens numériques

le réchauffement climatique, la dématérialisation des échanges entre humains

d’une crise (écologique, économique, sociale) qui engendrera l’entraide

de l’infect

l’information : la manipulation des masses -> (faire croire que la population choisit)

la raréfaction des hydrocarbures / réchauffement climatique

le temps

l’intelligence artificiel

de la famine l’eau douce / potable

eau

de la crise financière

quand dès la petite enfance nous apprendrons la démocratie au sens grec, à débattre, à écouter, à s’exprimer dans le respect – à prendre des décisions collectives sans idées partisanes – sans tabou

repli identitaire et sécuritaire, une société biopolitique de la traçabilité causé -> causé par épuisement des ressources

politique publique à court terme dictée par l’oligarchie financière

(tous des) déchets ? le réaliser sera le commencement…

quand, échanger avec un autre inconnu, différent, sera plus important que quoi que ce soit d’autre. (schizophrénie au travail, famille recomposée)…

l’exode urbain ?

le réchauffement climatique

le changement climatique

climat

internet

classement des personnes par catégorie sur base d’analyse scientifique (ADN, algorithmes,…)

internet et smartphones

les data (close or open…)

pollution

changement climatique ou les zombies kleptomanes

climat

de la crise climatique

d’avantage de relations numériques consuméristes, d’avantage de replis communautaristes

la maîtrise de l’antigravité et de l’énergie du point zéro

* l’emprise du numérique sur les relations humaines, l’oubli de l’authenticité (réseaux sociaux), relations + vides + basées sur les apparences que sur le cœur de la relation * montée d’autres régimes, fascisme, brèches dans le respect démocratique + discrimination + méfiance

ils viendront de la distance physique entre les individus

la capacité ou l’incapacité à renoncer sans contrainte extérieure

la fin du pétrole

de l’humain

si l’homme à un avenir il le devra justement aux relations humaines

la fin du couple monogame hétérosexuel

non-binarité (éco-) féminisme et décolonisation

parvenir à abolir (enfin) le patriarcat et les constructions sociales autour du genre

déploiement de la « sororité » ?

langage / cerveau -> neurosciences / climat

organiser la démocratie à partir de la base par des comités citoyens et/ou toute forme différente qui permet de faire émerger la parole et les décisions

de petite révolution en petite révolution, de prise de consciences en prises de consciences… (?)

la Finance, la dengue

les réseaux sociaux, partage d’individus directement à d’autres individus

les artisans, leur place dans la société

la Réalité Augmentés / Virtuelle, la Religion, le végétarisme nécessaire

de citoyens responsables et engagés, préoccupations : autoritarisme, surpopulation

l’apprivoisement (ou non) des réseaux sociaux

la surveillance par les nouvelles technologies

le terrorisme écologique

de la capacité de résilience des survivant·e·s

les changements climatiques, les pénuries et les nouvelles migrations

les données

d’une re-localisation des échanges ((n’excluant par une prise en compte globale du monde))

solidarité, union des gauches (à bas les égos !!) pour l’intérêt général, du peuple & fin du capitalisme

de l’anarchisme queer (ça me préoccupe pas, ça me fait jubiler) Sinon : • la chute du capitalisme, • l’arrêt de production des matières premières

l’espoir ou non

des jeunes localement

« gamification » des interactions perte de l’encrage dans une « communauté » locale

fin de l’anonymat ?

réseau socio

la conscience planétariste, vivant dans cette Terre là, frontières rendues absurdes, ou le chaos et le fracas des armes. Tendre vers l’invisible qui relie.

les selfies 🙂

les rapports de force économiques et écologiques

effondrement énergétique

en développant nos capacités à combattre le capitalisme mercantile et lsa publicité

de la crise finale du capitalisme (c’est-à-dire du prochain krach boursier).

Une forme larvée d’inquiétude

Les 28 et 29 septembre 2019, Zanzibar s’est réuni à Schiltigheim, Bas-Rhin.
Zanzibar a travaillé suivant les protokools suivants et produit des textes que vous pouvez télécharger ici.
Ce sont des variations astrologiques sur une forme larvée d’inquiétude.
Zanzibar est aussi allé visiter l’hôtel de la rue à la brasserie Grüber.
Protokools
L’univers est né le mardi 7 février. Il est verseau.
Horoscope lu dans les Dernières Nouvelles d’Alsace
Travail : votre projet manque de clarté quand aux moyens financiers à vite mettre en œuvre.
Amour : une opportunité de perdue… ne rêvez pas, cette maxime est mensongère.
Santé : grande capacité à récupérer.
Part 1
En 20 minutes, écrire un texte sur le futur qui prenne en compte cet horoscope.
Résumer en une phrase les textes de chacun des autres participants.
Ecrire reprenant les quatre parties.
Part 2
On se rappelle le premier round des obsessions partagées  : et si on recommençait, en flash-fictions ?
luvan bat le rappel sur le zanzimail, chacun des répondants communique trois obsessions, transposées sur papier, jetées dans un chapeau et extraites par un pied innocent.
Chacun dispose de trente minutes pour produire une flash-fiction.

Dessin de luvan à l’hôtel de la rue

Love in Zanzibar